Abécédaire

Lettre V

Variétés

Voisin Voisine

Vox Populi

 

VARIÉTÉS : Patrick Sabatier, Stéphane Collaro, Patrick Sébastien, Thierry Ardisson, André Lamy, Yves Lecoq... tous ces professionnels sont venus animer des émissions de variétés sur La Cinq. Rarement pourtant, ces émissions, véritables Rolls-Royce des programmes télé, ne sont restées à l'antenne aussi peu de temps ( en moyenne trois mois ). A l'origine, le pari est simple. Il s'agit de faire de la Cinq une chaîne généraliste et nationale. Pour attirer le maximum de téléspectateurs, les variétés font figure de valeurs sûres en remportant les suffrages du public depuis la nuit des temps audiovisuels. Hersant et Berlusconi se donnent les moyens de leurs ambitions. Ils débauchent à prix d'or les trois locomotives d'audience que sont Sabatier, Sébastien et Collaro.

Finis les strass et les paillettes des shows à l'italienne, le public va pouvoir découvrir des variétés " à la française " comme il les aime. " Dix sur dix " et " Bon anniversaire " de Patrick Sabatier, " Collaricocoshow " de Stéphane Collaro, "Farandole " de Patrick Sébastien démarrent en grandes pompes en septembre 1987. Les formules de ces émissions sont éprouvées, les moyens conséquents ( une émission de Sabatier coûte 3,5 millions de francs. Celle de Collaro tourne autour de 3 millions ) et les recettes attendues ( les 30 secondes de publicité se vendent 270 000 francs soit le tarif le plus cher de la grille de la Cinq).

En moins d'un mois, un constat terrible s'impose : les téléspectateurs ne sont pas au rendez-vous. Sabatier, habitué aux 25 à 30% d'audience de la Une, ne dépasse pas Les 5%. Sébastien et Collaro ne sont pas mieux lotis. Les raisons de cet échec : les émissions de variétés réalisent généralement leur meilleure audience dans les zones rurales et La Cinq n'est pour le moment diffusée qu'en zones urbaines. La Cinq couvre alors très mal le territoire : moins de 200 émetteurs contre plus de 3000 pour TF1, France 2, et France 3. De plus ce n'est pas l'animateur qui fait le succès d'une chaîne mais plutôt l'inverse ( exemple : TF1 ).

Conséquence, en vertu du sacro-saint rapport prix-qualité-audience, ces émissions sont purement et simplement supprimées. Seul Thierry Ardisson et ses " Bains de minuit ", fort d'un concept novateur et d'une audience estimable, sauve son émission. Quatre ans plus tard, l'histoire se renouvelle. Hachette abat sa carte maîtresse : les variétés. André Lamy et son " Grain de folie ", "Lecoq tel " d'Yves Lecoq, les grands shows des époux Carpentier, des maîtres en la matière, n'ont pas plus de succès. Quel destin pour une chaîne portée sur les fonds baptismaux en chansons.

VOISIN VOISINE : Premier téléroman français à être diffusé sur une chaîne de télévision. En guise de décor, un studio meublé façon lkéa. Comme personnages : le propriétaire du studio, sa copine, ses parents, ses amis, ses voisins, sa tante Julie et son oncle d'Amérique... Pour l'histoire, les va-et-vient de tout ce petit monde avec leurs petits malheurs et leurs grandes joies. L'ensemble découpé en 380 épisodes.

Enfin et surtout, l'intérêt d'une telle production : permettre à La Cinq de satisfaire aux fameux quotas imposés par son cahier des charges (volume de production française, œuvres d'expression originale française et diffusion d'œuvres françaises). La réalisation de Voisin Voisine a révolutionné les conditions de tournage en France. Pas moins de 18 épisodes sont mis en boite chaque semaine. Un record ! Bref cette série est loin, très loin d'être un point fort de la création française; elle n'est que le fruit des non-sens de la réglementation audiovisuelle. Mais pour être la première du genre, elle aura marqué son époque et conquis ses adeptes !

 

VOX POPULI : Pour la première fois, un lien direct s'est établi entre une chaîne de télévision et ses téléspectateurs. Pour la première fois, cette trop fameuse majorité silencieuse s'est exprimée là où on l'attendait le moins : tout simplement pour que La cinq vive !En quatre mois de crise, 1,4 million de personnes se sont retrouvées au sein de l'Association de Défense de La Cinq. Du jamais vu. Ce qui a fait dire au publicitaire Jacques Séguéla que c'est le premier parti de France. Dès l'annonce du plan de licenciement le 17 décembre 1991, la réaction des téléspectateurs est immédiate.

Des milliers de lettres, de télécopies en provenance de France et de l'étranger inondent le 241 boulevard Pereire. La news room se transforme en gigantesque dazibao. Que pouvons-nous faire pour vous aider ? Preuve est faite que l'apathie des Français devant leur poste de télé est un mythe. Sous l'effet de la menace de fermeture, de la disparition d'une chaîne, c'est une masse de téléspectateurs surgie de la France entière qui rejoint dans son combat le personnel de La Cinq.

La télévision est destinée aux téléspectateurs, certains ont tendance à l'oublier, voyant des données statistiques que l'on sacrifie volontiers au dieu Audimat. Ce formidable élan de solidarité a survécu à la mort de La Cinq en se poursuivant toujours aujourd'hui, dans l'action de l'Association. Cinq you Chers téléspectateurs !

 

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